SPÉCIAL PROJET DE RÉFORME DES RETRAITES

Nouvelle version éditée par la Fédération CGT du Spectacle – 14 -16 rue des Lilas Paris 19 – 13 Décembre 2019


AMPLIFIONS LA GRÈVE APRÈS LE SUCCÈS DU 5 DÉCEMBRE ET LES ANNONCES SCANDALEUSES DU 1ER MINISTRE !

1,5 million de personnes ont entamé la lutte le 5 décembre pour exiger le retrait du projet de réforme à points, que le gouvernement s’acharne à maintenir. Il faut continuer à convaincre les effets néfastes de cette réforme pour toutes nos professions : que l’on soit salarié.e du privé, particulièrement artiste ou technicien.ne intermittent.e du spectacle, que l’on relève des régimes spécifiques de l’Opéra de Paris et de la Comédie Française, que l’on travaille dans la fonction publique, ou que l’on soit autrices/auteurs. Les annonces d’Édouard Philippe du 11 décembre confirment que la réforme à points, c’est le nivellement par le bas, la répercussion accrue sur la retraite des inégalités, notamment pour les femmes et/ou les précaires.

Départ à 64 ans : une autre façon de baisser les pensions réelles.

Le maintien de l’âge de départ officiel à 62 ans est un leurre, il faudra atteindre 64 ans pour une retraite à taux plein. Partir avant ne sera pas un « choix » comme le présente le gouvernement, car plus de 50 % des travailleurs ne sont plus en emploi après 60 ans. Dans nos métiers, tenir jusque 64 ans est mission impossible. Donc il y aura une décote jusqu’à son décès…

Attention : arnaque sur le budget de la Culture !

Sachant pertinemment les dégâts que peut occasionner la réforme dans le champ du ministère de la Culture, les ministres Delevoye et Riester ont tenté de déminer les sujets « intermittents du spectacle », « Opéra national de Paris et Comédie française » et « autrices/ auteurs ». Contre l’avis du ministre de la Culture qui mange son chapeau, le budget du ministère doit être mis à contribution pour financer des dépenses sociales : 350 millions € par an pour financer l’équivalent des cotisations patronales pour les artistes autrices/auteurs ; autour de 110 millions € de compensation d’un abattement de 30% pour les intermittents, alors que nous voulons les voir supprimer ; la même chose pour les journalistes et les architectes …
Sur un budget de 3 milliards hors audiovisuel public, même avec une rallonge forcément provisoire, le ministère et la création n’y survivront pas ! On voit déjà les effets sur les missions qui disparaissent ou sont amoindries, sur l’emploi direct ou indirect : la lutte contre la suppression de postes à Radio France illustre le besoin d’empêcher la casse de l’emploi dans toutes nos maisons et explique les difficultés d’activité des salarié.e.s intermittent.e.s du spectacle ou des autrices et auteurs.

Aucune étude d’impact.

Opposés à cette réforme, nous avons exigé des études d’impact sur tous nos métiers : le grand flou volontaire continue. Prenons le temps de convaincre un maximum de collègues du danger qui les guette ! Exigeons une amélioration du système actuel plutôt que sa destruction !


✓ Un recul pour toutes et tous !

Pour les salarié.e.s du privé, le calcul de la pension de retraite se fait dès lors que l’âge limite est atteint (officiellement de 62 ans) et que le nombre d’annuités est complété (168 trimestres pour le moment – année 1963). On prend en compte alors un pourcentage des salaires moyens des 25 meilleures années.

Pour les salarié.e.s du public, même âge limite et nombre d’annuités, mais du fait des salaires très bas en début de carrière, le calcul se fait sur le salaire des 6 derniers mois.

Dans un système à points, ce sont uniquement les points accumulés quand on travaille qui permettent le calcul de la pension. Le système de retraite universelle par points est défavorable à plusieurs égards. Il pénalise les plus bas salaires, ceux qui souffrent de précarité (notamment de chômage non-indemnisé) : les moins qualifié.e.s, les femmes en seraient particulièrement victimes. De plus, ce système rompt avec notre retraite solidaire en créant un système individualisé, de moins en moins mutualisé, qui accentue les inégalités à la retraite.

Enfin, le pilotage de ce régime à points permettrait aux gouvernements successifs de baisser les pensions. C’est ce qui s’est passé en Suède. Et c’est Fillon qui en parle le mieux ! (Scannez le QR code pour lire la vidéo).

✓ 1000€ garantis … un gros mensonge !

Pour faire passer la pilule, le gouvernement promet une retraite minimum de 1000 €. Pour autant, ce minimum de retraite ne vaudra que pour les « carrières complètes ». En clair, aucun.e intermittent.e , aucune autrice et aucun auteur ne remplira la condition.

✓ Opéra National de Paris / Comédie-Française

Les régimes spécifiques de ces deux établissements nationaux sont le fruit de l’histoire et de conditions spécifiques. – Ainsi les danseuses et danseurs de l’Opéra national de Paris peuvent bénéficier d’une première retraite partielle à 42 ans à l’occasion de leur licenciement d’office. – À la Comédie-Française, le calcul de la pension est proche de celui des fonctionnaires.
Dans tous les cas, la suppression ferait tomber le contrat social et abaisserait le niveau de retraites, sans rien changer au travail de nuit ou du week-end, sans augmenter les salaires, dont la majorité sont très bas.

✓ Artistes auteurs : la grande illusion

La situation est critique pour les artistes auteurs. Avec un système à cotisation unique fixée à 28%, la réforme occasionnerait une hausse importante des cotisations pour les artistes auteurs pour des pensions plus basses. C’est perdant/perdant ! Pour tenter de déminer, le haut-commissaire, Delevoye, promet d’arroser d’argent public et de prendre 250 millions par an sur le budget de la culture pour financer une partie de ces cotisations. On marche sur la tête !
Cette solution n’est pas pérenne et menace directement le budget de la Création du ministère de la Culture dont nous connaissons la fragilité !

✓ Intermittent.e.s : de 12 à 70% de baisse

Les artistes et les technicien.ne.s intermittent.e.s du spectacle connaissent déjà des carrières très souvent chaotiques, qui se traduisent par des retraites très basses.

Dans les faits, le système même de retraite par point à une grave conséquence : il est très défavorable à tous les précaires. Dans le système actuel, on calcule la pension à partir des 25 meilleures années. Alors que dans le système à points envisagé par le gouvernement, les points sont « accumulés » tout au long de la carrière, pendant 42, 43, 44 ans ou plus… Donc les mauvaises années sont très défavorables et ne sont plus « lissées » par le calcul ! Les périodes de chômage non indemnisées vont peser, à la baisse, encore plus lourd que maintenant notamment les jours de carences et franchises. Même avec seulement 5 mauvaises années sur toute une carrière, c’est 12% de baisse minimum. Pour les plus précaires, cela pourrait aller jusque 70% de baisse !

Quant aux périodes de chômage indemnisées, le gouvernement promet « des points de solidarité », mais sans donner de précisions, ni sur leur nombre ni sur le montant : un intermittent qui aura alterné toute sa carrière des périodes de travail et de chômage, même indemnisées, n’aura jamais une carrière complète.

FOCUS SUR LE RETOUR DES ABATTEMENTS …

Certains métiers se voient appliquer des abattements : un abattement de 30 %, signifie que les droits à sécurité sociale, donc à la retraite ne sont pas calculés sur 100 % du salaire brut mais sur 70 %. C’est un cadeau fait aux employeurs qui payent moins de cotisations patronales, mais cela diminue d’autant les droits à la retraite.

Actuellement, seules quelques catégories de technicien.ne.s et d’artistes peuvent se voir appliquer un abattement, et normalement sur la base du volontariat, que doit solliciter l’employeur. Nous conseillons bien sûr de refuser cet accord. En 2016, nous avions réussi à supprimer l’abattement sur les cotisations assurance chômage des intermittents du spectacle, et avions l’intention de les supprimer partout.

La réforme Delevoye risque de faire revenir les abattements par la fenêtre. Riester et Delevoye jurent que ces abattements patronaux seront compensés par le budget du ministère de la Culture, lequel serait abondé. Le danger est double. Il n’y a aucune raison que le ministère la Culture devienne le ministère des Affaires sociales du spectacle (on voit le risque pour l’assurance chômage !). De plus, nous savons très bien que Bercy ne compensera pas un tel dispositif, ni totalement ni dans la durée.

✓ Femmes : des inégalités accrues …

La réforme des retraites fera baisser les pensions de toutes et tous, mais elle sera particulièrement défavorable aux femmes.

  1. Prise en compte de toute la carrière, donc des inégalités !
    Les années de temps partiel et de précarité vont se payer lourdement. Le projet de réforme des retraites prévoit de prendre en compte l’ensemble de la carrière au lieu des 25 meilleures années dans le privé ou des 6 derniers mois dans le public. Avec ce système, les années de temps partiel ou d’interruption de carrière pour des raisons familiales seront pénalisantes au moment du calcul de la pension !
  2. Recul sur les droits familiaux et les pensions de réversion.
    Les droits familiaux et pensions de réversion permettent de réparer une partie des inégalités de carrière entre les femmes et les hommes. Le gouvernement veut les fragiliser : aujourd’hui, chaque enfant donne droit à la validation pour les retraites de 8 trimestres dans le privé et 4 dans le public. Pour chaque parent de plus de 3 enfants, le montant de la pension est majoré de 10 %. Ces majorations seraient supprimées et remplacées par une majoration de 5 % au premier enfant pour le père ou la mère. Un recul global et le risque que ce soit le meilleur salaire – en général le père – qui prenne la majoration !
    Les pensions de réversion ne seront plus accessibles automatiquement en cas de divorce et pourront seulement être touchées une fois que le conjoint survivant sera à la retraite, alors qu’aujourd’hui elles sont ouvertes dès 55 ans dans le privé.
  3. Report de l’âge de départ en retraite .
    Un recul pour les femmes. La réforme des retraites vise à mettre en place une règle d’or qui bloque les ressources à leur niveau actuel (14 % du PIB), alors que le nombre de retraité.e.s augmentera de 30 % d’ici à 2050. La conséquence : le montant des pensions sera revu à la baisse et il faudra travailler toujours plus longtemps pour avoir une bonne retraite. Du fait des charges familiales, les femmes ont des durées de carrière plus courtes que celles des hommes. Reporter l’âge de départ à la retraite à 64 ans défavorise donc particulièrement les femmes !

✓ Les agents de la fonction publique grands perdants…

Enseignants en conservatoire, artistes des opéras et orchestres de région, les fonctionnaires ne sont pas « privilégiés », les salaires sont notoirement bas, le montant moyen de leur retraite est le même que celui des salariés, à qualification égale. Rien ne justifie cette réforme démagogique à leur détriment.

Le calcul de la pension sur les 6 derniers mois est fondé sur la grille de carrière linéaire des fonctionnaires. L’intégration des primes, annoncée comme une solution, ne compensera pas la sous-rémunération du début de carrière, parfois sous le SMIC en catégorie C, celles avec les plus bas salaires. Cela accroitrait même les inégalités entre les fonctionnaires faisant le même travail, en regard des employeurs publics locaux notamment.

Les enseignants de l’Éducation nationale, tous en catégorie A, sont les grands perdants avec un taux de prime le plus bas de la fonction publique. Et les enseignants artistiques de la fonction publique territoriale, majoritairement en catégorie B, ont des rémunérations plus basses encore. Après des années de gel de l’augmentation du point d’indice, la compensation salariale promise ne corrigera rien. Cette promesse est un leurre visant à diviser les salariés.

La pension de réversion des fonctionnaires est aujourd’hui sans condition d’âge et de plafond de ressources. La réforme veut introduire une condition d’âge et un plafond de ressources, qui va largement léser les veuves et veufs.

✓ Jeunes : les générations sacrifiées !

Comme tout le monde, quand on commence une activité professionnelle, la retraite paraît très loin. Certains se disent même qu’elle n’existera plus. Et pourtant, même s’il est difficile de se projeter sur sa fin de carrière, penser à la retraite, c’est penser à l’ensemble de la protection sociale dont tout le monde peut avoir besoin à un moment ou un autre : la sécurité sociale mise en place progressivement par de nombreux combats, est toujours incomplète, elle doit être améliorée et non dégradée. On peut toutes et tous être malades, en accident du travail, vouloir avoir des enfants, être au chômage, et enfin vouloir une retraite.

Le gouvernement est particulièrement violent avec les jeunes .

La précarité imposée par les réformes du code du travail ou de l’assurance chômage poussent particulièrement les jeunes à vivre dans l’insécurité. Macron et son gouvernement envisagent de rendre les conditions d’accès à la retraite de plus en plus difficiles et le calcul de la future pension encore plus défavorable pour les plus jeunes. Le calcul par des points acquis tout au long de la carrière, plutôt qu’un calcul sur les 25 meilleures années, pénalise les jeunes : ne sont pas comptées les années d’études, les périodes de précarité, notamment chômage sans allocations, tandis que les faibles salaires des périodes de petits boulots font baisser le calcul. Dans les entreprises, les jeunes cadres sont poussés à « capitaliser » dans des produits d’épargne retraite soumis aux aléas de la bourse. C’est rompre avec notre système de la « clause du grand-père » : le gouvernement pour faire passer sa réforme promet une entrée en vigueur pour les jeunes nés à partir des années 2000. Le gouvernement pense que cela calmera les actifs actuels, mais au contraire de plus en plus de travailleurs sont choqués par ce procédé et sont décidés à se battre pour leurs enfants, voire leurs petits-enfants.

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