A propos de la Tribune « Nous sommes le documentaire ».
Une Tribune circule au sein de la profession à propos de la réalité du documentaire. A la première lecture de ce document nous nous sommes sentis solidaires des problématiques évoquées dans ce texte. Car il est vrai que : « la vitalité de la création documentaire masque très largement « la grande précarité de la fabrication de ces œuvres et leur absence des chaînes de télévision nationale. »
Une lecture plus attentive de ce texte amène très rapidement des interrogations :
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« Ces derniers (les documentaires) ne bénéficient même pas, du point de vue du droit social, des souplesses accordées aux longs métrages de fiction. » Ici, il convient de rappeler que le documentaire doit appliquer la Convention collective nationale de la production audiovisuelle quand il est élaboré en vue d’une diffusion pour la télévision. Au sein de cette convention, le salaire qui s’applique aux technicien(ne)s est spécifique et il tient très largement compte de l’économie du secteur. De plus, dans cette Convention, il n’est pas prévu de niveau de rémunération minimale pour le réalisateur ce qui pose un vrai problème pour que les documentaristes puissent vivre de leur métier.
Dans la production cinématographique le documentaire se voit doté d’un régime dérogatoire spécifique et il n’est pas acceptable selon nous d’imaginer que le documentaire soit exclu de ses obligations conventionnelles. En effet, il y aurait comme un trop évident paradoxe à vouloir améliorer la précarité de la fabrication des œuvres documentaires en suggérant la réduction des niveaux de rémunération de celles et ceux qui les fabriquent.
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Autre piste avancée parmi les solutions proposées, celle de doter « certaines chaînes locales [publiques, privées ?] , celles qui soutiennent réellement la création […] d’une part minime de la redevance audiovisuelle », cette solution, au moment où le discours politique sur la télévision publique consiste à dire que l’on peut faire mieux avec moins de financement, cette solution ne nous semble pas aller dans le bon sens, sauf à prévoir une aide particulière pour les chaînes locales sous statut public. D’autant que la prochaine étape de la réflexion engagée sur la télévision publique prévoit la réduction du nombre des chaînes du service public.
Ainsi, si nous partageons très largement le constat quant à la précarité de la réalisation du documentaire, nous regrettons qu’une fois encore, et par économie de réflexion les solutions envisagées, pour l’essentiel, passent soit par une réduction des salaires et/ou une dégradation des conditions de travail des salariés, ou alors par une redistribution de fonds entre des structures notamment publiques qui justement en manquent.
D’autres solutions sont à trouver, qui pourraient prévoir, par exemple, des obligations de financement plus contraignantes en matière de documentaires. On pourrait également envisager la création de fenêtres ou de chaînes en charge de diffuser le documentaire… des solutions qui consistent à vouloir, au final, en réduire le coût nous semblent de nature plus préjudiciables que le mal dénoncé, et bien réel, par cette Tribune.
A Paris, le 16 mars 2015, le Conseil national.