Le Cinéma, une grande famille qui vide ses placards … Souhaitons qu’on n’y trouve pas de cadavre.

Beaucoup de techniciens sont comme moi déchirés et meurtris par les textes et les appels qui se succèdent contre la convention collective.

Cet état de crise profonde est le résultat de la campagne de désinformation qui a démarré en janvier 2013 soit plus d’un an après la signature de la convention. Initiée par des producteurs, cette campagne s’est amplifiée avec l’aide de nombreux réalisateurs qui ont adopté une attitude que nous n’attendions pas. Ils prennent eux aussi position contre la convention collective au nom du droit à l’existence de leurs films.
Ils vont jusqu’à se transformer en « partenaire social » (élu quand ? Et par qui ?) puisqu’ils font leurs propres propositions (au nom de qui ?).
Ils prétendent se placer au-dessus de la « mêlée » niant le travail effectué par les syndicats représentatifs des salariés et plus largement l’adhésion manifestée par la majeure partie des ouvriers et techniciens à la convention signée.
Comment en est-on arrivé là?

Le plus souvent, les réalisateurs mettent des mois, des années, avant d’arriver à faire leurs films. Ils font un travail énorme : de l’écriture du scénario à la force de conviction qu’ils doivent déployer pour emporter l’adhésion d’un producteur et d’une équipe…
Ils cherchent et obtiennent souvent eux-mêmes des financements.
Au fil du temps, un glissement progressif de leur rôle et de leur fonction s’est opéré. Ils se sont transformés en producteurs à leur corps défendant (pour la plupart d’entre eux) et c’est ce rôle qu’ils entendent jouer aujourd’hui.
En s’autoproclamant négociateurs, signifient-ils le changement de leur statut ?
Est-ce qu’ils troquent leur place de salarié pour celle d’employeur ?
Ce qui est en train de se jouer bouleverse la distribution des rôles.

Jusqu’à présent, séduits, entraînés, emballés par le projet, le film à faire absolument, les techniciens comme les réalisateurs ont souvent accepté de travailler à n’importe quel prix au nom du cinéma.
Y a-t-il d’autres secteurs qui connaissent ce type de fonctionnement ?
Y a-t-il beaucoup de salariés dans le monde du travail qui abandonnent une partie de leurs salaires pour avoir la possibilité de travailler, la chance de participer à la fabrication de quelque chose d’unique, le film d’un auteur ?
Quels bénéfices tirons-nous de cette aliénation  » consentie  » ?

Ces pratiques professionnelles exceptionnelles et librement acceptées,
ces réalisateurs voudraient les transformer en règles et obligations.

Au nom de l’exception culturelle, ils voudraient imposer une exception sociale. En soumettant les salaires des techniciens au budget du film, ils imposent les règles communes du commerce.
Où est la cohérence ?
Si le cinéma n’est pas un produit commercial comme les autres, pourquoi adapter un ajustement des salaires en fonction des besoins de l’entreprise -film- ?

La production cinématographique est très largement financée par le fonds de soutien du CNC. C’est en somme de l’argent public.
Nous réclamons sans cesse des droits, des subventions, et en cela nous avons raison.

De plus nous techniciens et réalisateurs, bénéficions au nom de notre spécificité de règles particulières d’indemnisation du chômage.
Comment continuer à revendiquer tous ces bénéfices de l’exception culturelle en rejetant les règles du jeu social et en asservissant la condition des salariés à des règles commerciales ?

Les réalisateurs qui ont choisi la voie d’une négociation illégitime doivent savoir qu’ils jouent avec le feu.
En remettant en cause la légitimité des syndicats et les droits des techniciens, Ils créent la rupture et nous affaiblissent tous gravement face au MEDEF que nous aurons à affronter prochainement pour le maintien de nos droits à l’indemnisation du chômage.

Pensent-ils que pour sortir de l’impasse il fallait en arriver à la division ?

Le point de vue d’une technicienne.

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